mardi 31 décembre 2024

Faire l'amour / Gabriel Garcia Marquez

 


— Alors, que faisons-nous maintenant ?
— L'amour.
— Tu en es sûr ?
— Sí.
— Très bien, je vais me déshabiller.
— Attends, pourquoi retires-tu tes vêtements ?
— Eh bien... pour le faire, non ?

— Qui t'a dit qu'il fallait se déshabiller pour faire l'amour ?
— C'est comme ça qu'on fait, n'est-ce pas ?
— Non, ce n'est pas la seule façon de faire l'amour.

— Et alors, comment ?
— Garde tes vêtements. Parlons, discutons jusqu'à ce que nos voix s'épuisent. Rions pour tout et pour rien, plongeons nos regards l'un dans l'autre jusqu'à chercher des fragments d'éternité dans nos silences. Faisons-nous l'amour non pas avec nos corps, mais avec nos âmes.

Regardons-nous, encore et encore, jusqu'à ce que les mots deviennent inutiles, jusqu'à ce que le silence devienne plus éloquent que toutes les phrases. Et là, dans ce vertige muet, nous pourrons enfin nous toucher. Tu comprends ?

— Nous toucher ?
— Oui. Mais pas de la manière dont tu l'imagines. Nous toucher avec la douceur d'une caresse suspendue, qui glisse lentement jusqu'à se dissoudre dans l'éternité d’un câlin.

— C’est beau.
— Donne-moi ta main.
— Sí.
— Tu sens ? Là, dans cette chaleur silencieuse, réside une des mille façons de faire l'amour.

C’est ça, l’essence même.

Garde tes vêtements. Parlons jusqu'à ce que le jour se lasse de nous écouter. Laisse-moi te regarder, observer la courbure de tes cils, la courbe de tes lèvres, et si un baiser doit naître, il viendra sans qu’on le convoque.

Parlons encore, jusqu'à ce que nos mémoires n’aient plus de secrets, jusqu'à ce que nos âmes s’ouvrent sans retenue. Laisse-moi te contempler jusqu’à atteindre un plaisir sans égal, un délice pur et absolu. Laisse-moi te fixer, longtemps, jusqu’à ce que mes propres paupières fléchissent et m’invitent à rêver de toi.

— Et si tes yeux refusent de se fermer ?
— Alors je les garderai ouverts… pour te contempler toute la nuit.

 

Gabriel Garcia Marquez. 
Juste toi.


Merci Jean-Pierre pour ce texte magnifique. 

Je n'ai pas retrouvé les références mais quoi qu'il en soit et quel que soit l'auteur de ce texte c'est une bien belle manière de terminer l'année 2024


2 commentaires:

Thiabaud Jean Marc a dit…

Superbe. Merci.

Anonyme a dit…

Merci beaucoup, c'est magnifique, je ne sais pas si c'est du Garcia Marquez mais ce texte est puissant en effet. Meilleurs voeux à Alain, sa famille et iPapy!