jeudi 2 juillet 2015

La pratique du Silence

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Photo de Satya Remond.


" En bref, il s'agit de mener une vie plus contemplative, ce qui ne veut pas dire nécessairement moins active. Il s'agit de mener une vie plus recueillie, plus intériorisée, une vie où le dedans acquiert la valeur et le prix qui étaient autrefois attachés au dehors. A ce sujet , et afin d'inciter à cela, Zundel aimait à citer le splendide et célébre passage des Confessions de Saint Augustin :
"Trop tard, trop tard, je T'ai aimée Beauté toujours ancienne et toujours nouvelles!Trop tard je T'ai aimée et pourtant Tu étais dedans, mais c'est moi qui étais dehors.Et sans beauté, je me ruais vers ces beautés qui, sans Toi, ne seraient pas.Et tu étais toujours avec moi. C'est moi qui n'étais pas avec toi."
Le dépouillement exige le recueillement. Et le recueillement, seul, peut produire le détachement en ce que, seul, il permet, par une application attentive et aimante, de faire le vide de soi, de taire le moi, de ne "plus faire de bruit avec soi-même"... Et seul il permet de se mettre à l'écoute du silence intérieur dont les inflexions et la tonalité sont comme les paroles de Celui qui attend au coeur de notre être. Le silence est un guide très sûr qui conduit à celui qui en nous est plus grand que nous. M Zundel n'a de cesse de revenir sur cette importance capitale du silence intérieur dans le processus d'accouchement à soi-même : "il est évident qu'on ne peut rien faire sans le silence, c'est lui qui nous crée dans notre humanité, qui crée notre liberté et c'est en lui que nous rencontrons Dieu, que nous triomphons de notre biologie et des slogans qui dominent le public." Zundel écrit encore : "... pour découvrir cet immense espace qui fait d'un être humain un être universel, il faut entrer dans le silence le plus profond, il faut cesser de faire aucun bruit avec soi-même, il faut atteindre jusqu'à la racine de l'être, là où précisément notre personnalité jaillit du coeur à coeur avec l'Hôte bien aimé qui nous habite."La pratique régulière du silence intérieur est une nécessité pour la simple raison qu'il est nécessaire à la nouvelle naissance. Et sans elle, nous l'avons dit, il n'y a pour Zundel ni homme, ni chrétien : "Si nous ne ménageons pas, chaque jour, un moment de silence total, absolu, si nous ne faisons pas cette place à Dieu qui permet une seconde naissance, si nous n'atteignons pas ce niveau central où nous échappons à tous les courants de surface, jamais nous ne serons des hommes et des chrétiens." Et un peu plus loin, Zundel donne cette indication formulée de manière si extraordinaire : "C'est dans le silence que nous pourrons respirer la Présence de Dieu."."


Mort et émerveillement dans la pensée de Maurice Zundel 
 Michel Fromaget   
Lethielleux p73/74/75

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4 commentaires:

Sylvie de Berg a dit…

Merci Corinne. Je ne connaissais pas Maurice Zundel. Quelle découverte.
Afin de poster la citation de St Augustin sur ma page facebook je l'ai cherchée entière, et la voici, éblouissante :

Bien tard je t’ai aimée,
ô beauté si ancienne et si nouvelle,
bien tard je t’ai aimée !
Et voici que tu étais au-dedans, et moi au-dehors
et c’est là que je te cherchais,
et sur la grâce de ces choses que tu as faites,
pauvre disgracié, je me ruais !
Tu étais avec moi et je n’étais pas avec toi ;
elles me retenaient loin de toi, ces choses qui pourtant,
si elles n’existaient pas en toi, n’existeraient pas !

Tu as appelé, tu as crié et tu as brisé ma surdité ;
tu as brillé, tu as resplendi et tu as dissipé ma cécité ;
tu as embaumé, j’ai respiré et haletant j’aspire à toi ;
j’ai goûté, et j’ai faim et j’ai soif ;
tu m’as touché et je me suis enflammé pour ta paix.

Quand j’aurai adhéré à toi de tout moi-même,
nulle part il n’y aura pour moi douleur et labeur,
et vivante sera ma vie toute pleine de toi.
Mais maintenant, puisque tu allèges celui que tu remplis,
n’étant pas rempli de toi je suis un poids pour moi.
Il y a lutte entre mes joies dignes de larmes
et les tristesses dignes de joie ;
et de quel côté se tient la victoire, je ne sais.
Il y a lutte entre mes tristesses mauvaises
et les bonnes joies ;
et de quel côté se tient la victoire, je ne sais.

Ah ! malheureux ! Seigneur, aie pitié de moi.
Ah ! malheureux ! voici mes blessures, je ne les cache pas :
tu es médecin, je suis malade ;
tu es miséricorde, je suis misère.
N’est-elle pas une épreuve, la vie humaine sur la terre ? […]
Et mon espérance est tout entière uniquement
dans la grandeur immense de ta miséricorde.
Donne ce que tu commandes et commande ce que tu veux. […]
Ô amour qui toujours brûles et jamais ne t’éteins,
ô charité, mon Dieu, embrase-moi !

St Augustin, Confessions, X, 27, 38-29, 40
BA 14, p. 209-213.

Bien à vous tous, Sylvie

ipapy a dit…

Merci Sylvie, oui c'est magnifique.

Anonyme a dit…

Merci Alain
Karl

gjmtenba a dit…

Celui qui nait une seconde fois ne meurt qu'une fois ...

Quoi d'autre ?

gjm