dimanche 25 octobre 2009

Jung

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" Tels furent les événements décisifs de ma vie. Je commençais à comprendre: j'étais responsable et de moi dépendait la forme que prendrait mon destin. Un problème m'était posé auquel je devais répondre. Et qui posait le problème? A cela personne ne m'a répondu. Je savais que c'était moi qui devais répondre du plus profond de moi-même: j'étais seul devant Dieu, et Dieu seul me posait ces redoutables questions.

Dès le début j'avais en moi le sentiment d'une destinée implacable, unique, comme si j'avais été placé dans une vie qu'il fallait accomplir. Il y avait en moi une sécurité intérieure dont je ne pus jamais m'apporter la preuve, mais qui m'était prouvée. Ce n'est pas moi qui avais cette certitude; c'était elle qui me possédait malgré toutes convictions contraires. Personne ne put jamais m'enlever la certitude que j'étais placé là pour faire ce que Dieu voulait et non pas ce que moi je voulais.

Cela me donnait souvent l'impression, dans toutes les circonstances décisives, de ne pas me trouver parmi les hommes mais d'être seul avec Dieu. Toujours, quand j'étais "là-bas" où je n'étais plus seul, je me trouvais en dehors du temps. J'étais dans les siècles et celui qui donnait la réponse, c'était Celui qui avait toujours été là et qui y sera toujours. Les conversations avec cet "autre" étaient ce que je vivais de plus profond, d'une part lutte sanglante et, d'autre part, ravissement suprême.


De tout cela je ne pouvais naturellement m'entretenir avec quiconque. Je ne connaissais personne dans mon entourage à qui j'eusse pu faire des confidences, sauf éventuellement à ma mère. Sa façon de penser me paraissait semblable à la mienne.

Mais bientôt je m'aperçus que sa conversation ne me suffisait pas. Elle m'admirait surtout et cela n'était pas bon pour moi: aussi restais-je seul avec mes pensées et c'est cela que je préférais au fond. J'ai joué seul, pour moi-même; j'ai marché à travers bois et rêvé seul, et j'avais pour moi seul un monde mystérieux."

Ma vie C.G.Jung, éditions Folio, p.90...

Merci Sandrine
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5 commentaires:

Anonyme a dit…

Je sens de la solitude dans ce texte et en même temps la joie d'une grande découverte impossible à partager. Je ne connaissais pas du tout Jung sous cet angle.
Merci
Karl

Madeleine a dit…

Très beau passage qui me parle vraiment.
Merci Alain.

dimitri a dit…

...sans pouvoir le partager de prime-abord,
mince alors !

Catherine Bondy:Psycho-Praticienne et Peintre. a dit…

Des résonnances avec mon monde intérieur ... je ne connaissais pas non plus cet aspect de C.G.YUNG. :
un bonheur de lire ses mots qui traduisent si bien ce que l'on peut ressentir ...
Bon voyage dans le désert , Alain.

Berit a dit…

tres beau temoignage.
Merci Alain.