samedi 27 février 2010

Trappeur





Pour les amateurs de grands espaces sous la neige....
Je me suis régalée... Merci Jean-Louis d'avoir offert le livre à Alain !

Un extrait :

"Alors des milliers de voix, ses parents les plantes et les animaux, murmurent à ses oreilles. Le chant des loups s'élève en lui. Tandis qu'une larme roule doucement sur sa joue, il entend pleurer la forêt.

Petit à petit, inéluctablement, Michel a entendu monter son appel. Sans doute les cris des animaux dans ses pièges lui ont-ils ouvert les oreilles et le cœur; leurs derniers râles ont fini par devenir l'écho des bois. sans doute qu'à force de voir défiler tant de vies dans les yeux de ses victimes il a senti chavirer la sienne.Il en est certain, elle pleure, la forêt, noyée sous les eaux des barrages,coupée à blanc dans ses recoins les plus secrets.Sanctuaire profané, elle porte un lourd fardeau de plaintes des animaux devenus des parias; plaintes aussi des rivières détournées de leur lit naturel ou polluées à en faire crever les poissons. Depuis la nuit des temps elle connait le cycle de la vie et de la mort, où tout est violence et sérénité, drame et comédie, et compose avec. Périodiquement, tout meurt, tout renait. Le temps s'étire, infini. Mais maintenant elle enregistre des morts sans résurrection, des pulsations désorientées, des cadences instables, des disparitions spontanées, des croissances irraisonnées. Quand reprendra-t-elle son rythme naturel ? Ou plutôt quand ce nouveau rythme deviendra-t-il à nouveau naturel ? Y aura-t-il un autre commencement primordial, tel celui du premier matin et de la première nuit ?

Michel l'entend et frissonne. La résilience de cette forêt boréale est-elle limitée ? Y aurait-il un point de non retour ?"

P 223-224


3 commentaires:

Anonyme a dit…

Bien sûr qu'il y a un point de non-retour, un épuisement fatal.

gjm

yannick a dit…

Oui "trop peur"!

Olivier a dit…

Très beau témoignage de la communion avec la nature. Merci Corinne.