mardi 18 mars 2008

Petit traité sur l’immensité du monde.

Voici le très court livre d'un "fou" revigorant. Sur la quatrième de couverture on peut lire :

« Pour ralentir la fuite du temps, Sylvain Tesson parcourt le monde à pied, à cheval, à vélo ou en canot. Dans les steppes d'Asie centrale, au Tibet, dans les forêts françaises ou à Paris, il marche, chevauche, escalade aussi les monuments à mains nues. Pour mieux embrasser la terre, il passe une nuit au sommet de Notre-Dame de Paris, bivouaque dans un arbre ou sous un pont, construit des cabanes.
Cet amoureux des reliefs poursuit le merveilleux et l'enchantement. Dans nos sociétés de communication, il en appelle à un nouveau nomadisme, à un vagabondage joyeux. Ce Petit traité sur l'immensité du monde est un précis de désobéissance naturaliste, une philosophie de poche buissonnière, un récit romantique contre l'ordre établi. »




Et un extrait :

Souvent, assis sur la haute branche d’un arbre comme le violoniste errant (et propre à rien) de Joseph von Eichedorff, ou bien foulant un chemin de campagne, je me dis qu’il n’est pas de meilleur endroit qu’une cabane pour finir ses jours. Je m’interroge alors aussitôt sur le prix que nous devrons payer à la planète en la quittant. C’est que j’ai horreur de me sentir débiteur. Puisque nous ne faisons qu’emprunter depuis le premier jour de notre existence, il serait juste de s’acquitter ; pour alléger un peu sa dette. Le vagabond est plus redevable encore que les autres car non content de cueillir les fruits du monde, il a passé sa vie à se gorger de ses beautés. Et, quand vient l’heure de sa mort, il devrait se sentir étreint par l’angoisse de l’ardoise. Ma dernière volonté sera d’être enterré sous un arbre que mon corps contribuera à nourrir. Ce sera ma manière de m’absoudre. J’aurai assez dévoré de viande pour donner la mienne, en juste retour, à des asticots. L’incinération serait une inélégance de mauvais payeur. Une grivèlerie.
L’arbre poussera auprès de ma dernière cabane. Mon corps alimentera la sève qui pulsera dans le tronc et peut-être qu’un oiseau posé sur une branche lancera un trille qui guidera un vagabond égaré vers ma cabane.
Il pourra y entrer et s’y installer car, au cours de mes futures années dans les bois, ma porte sera ouverte en permanence à tout le monde à condition bien entendu qu’il ne passe jamais personne.

Paris-Irkoutsk-Saïgon, janvier - mai 2005


Petit traité sur l’immensité du monde
Sylvain Tesson
Ed Pocket p 166-67


8 commentaires:

Anonyme a dit…

c'est un vrai regal, une bonne bouffée d'oxygene.
A savourer aussi son "Eloge de l'energie vagabonde".
Michèle S

Anonyme a dit…

Hum hum, en voilà de bonnes et belles "choses" encore...
merci beaucoup et merci Michèle de témoigner en rajoutant ce partage.
Bonnne journée.

Anonyme a dit…

Donner que son corps me semble restreindre les possibilités de l'homme, non?
yannick

Anonyme a dit…

L'extrait donne envie de le lire.
J'ai lu un peu sa biographie sur le net : c'est impressionnant.
Merci Corinne
Karl

Stéphane a dit…

ça me parle avec force.
Merci beaucoup pour cette référence.

Ann a dit…

Je vais chercher deux de ses livres dès demain.

Déjà l'extrait sur l'émerveillement de décembre m'avait un peu clouée, là je suis reclouée.

Action

Anonyme a dit…

Hello Yannick, il donne son corps et aussi des Tesson(s) de bouteilles, pour commencer, étonnant, non!!!
J-P casson-petto

Pierre a dit…

Il y a tout de même là-dedans ce message généreux somme toute, un sens de l'avoir (se gorger de beautés) et une identification au corps... isn't it ?