Dans le silence, le compositeur américain fait entendre le son de la vie.
Le maestro arrive, sous les applaudissements. Il monte à son pupitre, ouvre son livret, esquisse un mouvement de baguette, et… se fige. Devant lui, aucun des musiciens de l’orchestre n’a fait mine d’empoigner son instrument. Grève musicale ? Catalepsie générale ? Déchirure temporo-spatiale ? Non, simplement, en ce soir de janvier 2004, le programme de l’orchestre de la BBC comporte une pièce silencieuse ! Intitulée 4’33’’, la partition de l’américain John Cage (1912-1992) prévoit effectivement qu’aucune note ne doit être jouée pendant les quatre minutes et demie de sa durée.
En 1951, notre compositeur d’avant-garde visite une chambre « anéchoïque » – une pièce, utilisée à des fins scientifiques, dont les murs et le plafond absorbent les ondes sonores. Alors qu’il pense ne rien entendre du tout, Cage s’aperçoit qu’il perçoit tout de même quelques sons, produits par son propre système nerveux et le sang battant dans ses veines. De ce constat naît, l’année suivante, 4’33’’. Une œuvre constituée, en fait, de l’environnement sonore et des réactions du public. Car, comme l’écrit l’universitaire Michel Remy dans la revue Cycnos, « 4’33’’ n’est pas du silence, ce n’est pas le silence, mais l’ouverture de conditions parfaites pour que puisse intervenir l’Autre » .
En regardant la vidéo de la BBC, on guette donc les bruits de toux, de feuilles froissées, de chaises déplacées, engendrés par les spectateurs de la performance. En oubliant parfois, puisque Cage jouait sur la perception du son, que celui produit de notre côté de l’écran est aussi partie prenante d’une œuvre définitivement unique.
Merci ami Karl
6 commentaires:
"la musique est l'architecture du silence" Robert Fripp,créateur du groupe King Crimson
Génial,c'est comme si les ondes sonores se dipersent ds l'univers pour arrivées nulle part.
C'est à ça que je vois que la soirée est parfaite.
attente : tendu vers, espoir
détente : sans tension, ouvert
fabuleux, je trouve ! c'est beau le son de la vie !
monthy pythonesque, so british ;:))
jmarc
Gamin j'ai passé un temps assez long dans une chambre de ce type, au Palais de Belle-Ile en Mer.
Je souhaitais entendre le frottement de mes paupières sur mes globes oculaires ! Il m'avait été dit que c'était possible ; je n'y suis pas parvenu, mais j'ai entendu un bruit de plus en plus difficile à supporter, même angoissant, celui des battements de mon coeur.
Dans des cantates de Bach, ce rythme fondamental de la vie est
largement utilisé.
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