mardi 5 juin 2012

Même le silence a une fin.



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Superbe témoignage.




"Je m’étais regardée pendant des heures dans un petit poudrier qui avait survécu à toutes les fouilles. Dans la glace ronde du couvercle, où je ne pouvais observer qu’un morceau de moi-même à la fois, j’avais découvert une première ride d’aigreur à la commissure des lèvres. Son existence m’avait terrorisée, ainsi que la détection d’un jaunissement des dents dont je n’étais pas entièrement certaine, car le souvenir de leur couleur originale avait disparu. La métamorphose qui s’opérait subrepticement en moi ne me plaisait aucunement. Je ne voulais pas sortir de la jungle comme une vieille femme rabougrie, rongée par l’amertume et par la haine. Il fallait que je change, non pas pour m’adapter, ce qui m’aurait semblé être une trahison, mais pour m’élever au-dessus de cette boue épaisse de mesquineries et de bassesses dans laquelle nous avions fini par patauger. Je ne savais pas comment m’y prendre. Je ne connaissais aucun mode d’emploi pour atteindre un niveau supérieur d’humanité et une plus grande sagesse. Mais je sentais intuitivement que le rire était le début de la sagesse qui m’était indispensable pour survivre."

P370-371


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1 commentaire:

yannick a dit…

Elle a fait l'équivalent de deux retraites bouddhistes de 3 ans 3 mois, sauf qu'elle était prisonnière. C'est inimaginable, car elle ne savait pas la durée en commençant!
Le résultat est qu'elle se consacre à des études de théologie maintenant, il me semble. "Les voies du Seigneur sont impénétrables", comme la jungle d'ailleurs. Survivre grâce au rire, quelle belle phrase, alors que tant de gens vivent en se plaignant...