Requiem / François Henri Soulié/ Extrait...

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" Haut dans le ciel flamboie l'écusson du soleil redoutable. Au sortir des bienfaisants ombrages, mille flèches de lumière criblent les paupières et embrasent la peau. Au long d'une pente douce, un vaste champ, qui fut de blé, étire ses chaumes déjà brûlés par la chaleur. Rabattant sur ses yeux la visière de son chapeau, Ghuilhem de Malpas se laisse glisser à bas de la selle. Il fait trop chaud pour accabler Midas (1) d'une charge inutile.

Ils descendent à pas lents, dans la bruyante fanfare des grillons qui s'ouvre et se referme sur leur passage. Et soudain, levant la tête, le troubadour découvre le but de leur voyage.

La citadelle de Termes, masse blanche haut perchée dans l'azur, semble une nef en forme de ville qu'un équipage céleste aurait fait se poser sur ce piton rocheux.

Voilà donc l'objet des convoitises des barons du Nord : un ingénieux tas de pierres empilées sur ces plus vastes pierres qui sont une montagne. Une astucieuse tanière, un nid savant où l'homme sans ailes, sans fourrure, sans crocs, sans griffes, protège sa fragile habileté contre ses prédateurs les autres hommes. Mais de la possession de ce gigantesque terrier en plein ciel dépend la jouissance de terres fertiles, de mines abondantes, de forêts giboyeuses génératrices d'un commerce florissant. C'est cela que veut accaparer l'Église de Rome. Afin de tirer le plus grand profit de toutes ces choses matérielles. Oui-da, un monde va finir et, dans son coeur mélancolique, Guilhem en berce l'agonie. Il a eu de la chance, ce monde lui fut doux. Mais fut-il si aimable qu'il vaille qu'on le pleure ? La disparition de l'humaine engeance tout entière vaudrait-elle que l'on versât une larme ?"

Requiem

Chap 38 Guilhem de Malpas, Le temps et les hommes

Ed 10/18 p 322

(1) son âne.

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