Le feu et la passion qui animaient Virginia bombardaient sans relâche mon abri de nacre afin de mettre à nu ce foutu grain de sable. Les premiers mois, j’avais vaillamment résisté, mais in. fine, sa fougue, sa rage de vivre, avaient eu raison de mes résistances. Jour après jour, je subissais ses assauts, eux-mêmes nourris de ses propres souffrances se révélant à mon contact. Quand l’un déguste, il y en a pour les deux! Parfois un s’agite tandis que l’autre digère en si-lence. Mais avec nos deux tempéraments de feu, cela pétait de partout. L’interprétation qu’elle faisait de mes réactions face à ses assauts réveillait encore plus ses souffrances, la faisant hurler et attaquer de plus belle. Ce que je projetais sur ses attitudes revendicatrices m’obligeait à faire face, à poser des limites, à contre-attaquer.
Ces derniers temps, nos réactions avaient redoublé d’intensité, de violence. Je me sentais perdu. Je ne savais plus quoi faire, comment réagir, que dire. Quelles que soient mes tentatives pour solutionner le problème, apaiser nos échanges, rétablir de l’harmonie... un seul et même résultat : la situation empirait! Pourtant, je n’arrivais pas à prendre la décision de partir, quelque chose me retenait dans cette relation. Je voulus alors à tout prix comprendre pourquoi les couples qui se déchirent restent ensemble, et tentai d’élever le débat.
Suite à des lectures diverses ( dont certaines tirées de l’oeuvre de Jung ) je pris comme point de départ de mes réflexions que l’âme possède en elle deux principes, un féminin et un masculin, qu’elle doit apprendre à connaître et amener à l’harmonie dans la relation.
Au moment où elle s’incarne, elle fait le choix de l’expérimentation dans la matière d’un de ces deux principes, déterminant de la sorte le sexe de l’enfant qui naît. Ensuite, qu’elle le veuille ou non, la personne est soumise au besoin de l’âme d’appréhender ces principes au travers des événements qui vont jalonner sa vie. Comme il est difficile, et surtout très abstrait, de prendre conscience en tant qu’homme à quoi ressemble notre principe féminin ou, en tant que femme, à quoi ressemble notre principe masculin, chacun cherche inconsciemment la plupart du temps le support de projection idéal qui va nous renvoyer concrètement à quoi ressemble notre principe non incarné.
C’est là qu’on tombe amoureux: on subit une attraction irrésistible pour une personne qu’on ne rencontrera jamais vraiment dans son essence, mais que l’on va vivre au travers de notre projection sur elle. Dès lors, les disputes dans le ménage nous montrent non pas que les deux protagonistes ne s’entendent pas, mais que le couple intérieur de chaque protagoniste ne s’entend pas. On peut ainsi relativement facilement dépeindre nos personnages intérieurs à partir de ce que l’on vit « pour de vrai» dans la relation à l’autre au quotidien.
Fort de ce constat, à dater de ce jour, je me mis régulièrement en état modifié de conscience pour « voir» le couple que formaient en moi mes principes masculin et féminin.
Le premier relevé que je fis n’était évidemment pas brillant. Je sortis de l’analyse de la situation avec la mention « peut mieux faire !» Et pour cause, l’entente entre mes personnages intérieurs était la copie conforme de mes échanges journaliers avec Virginia : explosive.
Une fois que je compris cela, ce fut irrémédiablement fini d’imaginer changer l’autre. Et pour cause : c’est impossible !
L’autre, d’une certaine manière, n’existe pas objectivement comme tel pour nous : il est vécu comme le reflet de la projection de notre moitié sur lui. Donc, quand on veut que
« l’autre change », on exprime en fait notre désir de voir évoluer la relation de notre couple intérieur, afin que s’améliore cette part de nous que nous projetons sur l’autre, et ainsi notre relation avec l’autre. Mais bon, soyons clairs et sincères ce n’est pas parce qu’on a compris le mécanisme que tout devient «peace and love » et qu’on ne s’engueule plus. Sinon, ça voudrait dire que parce qu’on a compris, c’est l’harmonie instantanée en soi, entre nos deux principes masculin et féminin. Sachant qu’aucun changement profond ne s’inscrit sans passage par les émotions, on continue donc à s’engueuler. Mais on sort de l’illusion ou de l’attente que l’autre va changer. L’engueulade, ce n’est plus que notre aveu d’impuissance à créer le changement en nous que l’on voudrait immédiat. Alors, en attendant, on libère de la sorte l’énergie de la frustration, et de temps en temps, ça fait du bien!
En somme, ce constat a quelque chose de fabuleux, car il signifie qu’il ne tient qu’à nous d’avoir la relation de rêve à laquelle on aspire faut plus changer de nana, faut changer de projections ! Bosser sur soi, quoi.
J’avais là une première ligne de conduite pour les mois à venir résoudre les conflits entre mon homme et ma femme intérieurs. C’était intéressant car, quand on sait que ces personnages se façonnent à l’image de nos parents, cela revenait à résoudre au sein de mon couple intérieur les conflits que mes parents n’avaient jamais résolus. Glups !
(P.S perso : Merci Stephanie pour le livre !)
5 commentaires:
Net et clair, drôle en plus !
Merci pour ce partage Julie.
ça peut servir.
fictre!çà a l'air bougrement intéressant,et je relies celà à certains propos de Durkheim sur le couple.Merci pour l'info
"Comme un arc-en-ciel, il est des mots reliant l'ombre et la lumière. Ceux-ci en font partie, porteur de messages à nous de savoir les lire et les concrétiser en soi afin de dire ainsi adieu à bien des déluges!!!" Merci Julie
Denise
et ce n'est que le début !!! juste une vie partagée et tellement de lumière ! bonne lecture julie ! bisous
Creuser,creuser en soi ,sans pour autant changer l'autre.
Merci de ce partage.
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