Custom

.

Les différentes motos peuvent être vues en fonction de leur utilité ou de l’image qu’elles véhiculent.

Une fois débarrassées de leur image de rebelles crasseuses ou de bourgeoises encanaillées et de leur absence d’utilité objective, on peut se concentrer sur les sensations particulières et incomparables que procurent les customs.

Bien assis entre le moteur et la roue arrière, je me souviens d’avoir été transporté par la puissance de la moto. Emporté dans mon assise, poussé dans mon centre de gravité, comme dans le première foulée d’un départ au galop, quand le cheval engage ses postérieurs sous son corps pour se propulser vers l’avant.

C’est à la fois par la puissance dans la roue arrière, au pneu démesuré s’agrippant au bitume, et par la légèreté de l’avant main ** que s’exprime le custom. C’est comme s’il ne fallait pas contrarier cette puissance. Comme pour certains chevaux qu’on ne peut monter qu’avec des mors légers, il faut se contenter de cette roue avant si loin, si imprécise et qui paraît si fragile.

Pourtant qu’il est beau de la voir sur les routes sinueuses, rebondir sur chaque gravier, libre dans le mouvement de la fourche, battement d’aile d’une mécanique exprimant la liberté et la parfaite adaptation à l’inconnu des singularités de la voie. C’est pour moi une image de l’harmonie.

J’aime cet équilibre que m’impose le custom entre la maîtrise de la puissance rageuse de la roue arrière, et la confiance en la douceur de la roue avant, entre l’action enclenchée par la rotation du poignet droit, et la contemplation de la danse de la roue avant.

Heureux bikers qui comme moi ont eu la chance de chevaucher ces délicates montures.

Jean-Baptiste Daubree

** "avant main" référence équestre qui fait rappelle la nécessité en équitation de ne pas faire porter trop de poids sur l'avant pour permettre au cheval d'exprimer son impulsion et sa légèreté. Ce problème fait débat en dressage depuis le XVème siécle.
.
.